Plus tendrement encore. La cloche, la`-bas, plus lourde
Que celle du Kremlin, sonne, et sonne dans ma poitrine, —
ainsi,
Qui sait? — Je ne sais pas, — peut-e  tre, — il se peut, — ainsi,
Je ne m’inviterai pas longtemps sur la terre russe!
Un soleil blanc et de tre`s, tre`s bas nuages,
Le long des potagers — derrie`re le mur blanc —,
Un cimetie`re. Et sur le sable des rangeґes d’eґpouvantails
De paille, sous des linteaux a` hauteur d’homme.
Pencheґe par-dessus les pieux de la palissade,
Je vois des routes, des arbres, des soldats en deґsordre.
Une vieille paysanne, pre`s d’un portillon ma  che,
Ma  che une tranche de pain noir avec du gros sel...
Pourquoi ce courroux contre ces maisons grises, —
Seigneur! — Et pourquoi trouer tant de poitrines?
Le train passe et hurle, et hurlent les soldats,
Et le chemin se couvre de poussie`re, et il s’eґloigne...
—Pluto  t mourir! Pluto  t ne jamais e  tre neґe,
Que, la`, pour ce pitoyable cri plaintif de forc  at
Vers les belles aux sourcils noirs. — Comme ils chantent
Aujourd’hui les soldats! O Seigneur mon Dieu!
Tu es ma rivale, et je viendrai chez toi,
Un jour quelconque, une certaine nuit claire,
Quand les grenouilles hurleront dans l’eґtang,
Et que les femmes seront folles de pitieґ.
Je m’attendrirai sur le palpitement
De tes paupie`res et sur tes cils, jaloux,
Je te dirai: je n’existe pas vraiment,
Je ne suis qu’un re  ve, dans ton sommeil.
Je te dirai: console-moi, console-moi.
Quelqu’un enfonce des clous dans mon cur!
Je te dirai, a` toi: le vent est frais,
Les eґtoiles — au-dessus des te  tes — sont chaudes...



Aux juifs

Toi, buisson de roses ardentes, qui
Ne t’a pieґtineґ, qui ne t’a eґcraseґ!
Seul immuable laisseґ sur terre,
Apre`s lui, par le Christ.
Israёl! Ton deuxie`me re`gne
Approche. Vous nous avez payeґ
De votre sang toutes les oboles:
Heґros! Tratres! Prophe`tes, mercantiles!
En chacun de vous — me  me s’il compte son or
Dans son baluchon, pre`s d’une chandelle —
Le Christ parle plus fort qu’en Marc,
Ou Matthieu, ou Jean, ou Luc.
D’un bout a` l’autre de la terre:
Crucifixion et descente de Croix...
Avec le dernier de tes fils, Israёl,
C’est le Christ que nous enterrons.
J’aimerais vivre avec Vous —
Dans une petite ville
Aux creґpuscules eґternels,
Aux eґternelles cloches —
Avec la sonnerie deґlicate
D’une horloge ancienne — les gouttes du temps —
Dans une petite auberge de campagne.
Et le soir, quelquefois, d’une mansarde ou l’autre —
Une flu  te,
Et le flu  tiste a` la fene  tre.
Et de grandes tulipes aux fene  tres.
Vous ne m’aimeriez, peut-e  tre, me  me pas.
Au milieu de la chambre — un poe  le de faїence eґnorme,
Avec sur chacun des carreaux — une image:
Une rose — un cur — un bateau —
Et derrie`re l’unique fene  tre:
La neige, la neige, la neige.
Vous seriez coucheґ — comme je vous aime: insouciant,
Indiffeґrent, paresseux.
De temps en temps, le brusque frottement
D’une allumette.
La cigarette s’allume, s’eґteint,
Et longtemps, longtemps, tremble a` son extreґmiteґ
Un court cylindre gris — la cendre.
Vous e  tes trop paresseux pour la secouer.
Et toute la cigarette vole dans
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Цветаева М.И.   Если душа родилась крылатой